Le Temps, Publié lundi 17 août 2020

RETRAITÉ ACTIF

L’ancien «Monsieur Coronavirus» est devenu un consultant aussi sollicité que visible dans l’espace public. Le fait d’être rémunéré pour s’exprimer dans des conférences lui vaut maintenant des inimitiés. «Le Temps» a parlé chiffres avec le médecin chauve le plus populaire de Suisse

«Il y a des choses pour lesquelles je me fais correctement payer, mais ce n’est pas une entreprise; je suis très demandé et je fais ce qui me fait plaisir», déclare Daniel Koch à propos de sa nouvelle activité de consultant. — © Peter Schneider/Keystone

Combien gagne Daniel Koch? La question agite certains médias depuis que l’ancien «Monsieur Coronavirus» de la Confédération mène une retraite très active, entamée début juin. Omniprésent dans l’espace public, Daniel Koch irrite dans certains cercles fédéraux, davantage habitués à ce que les anciens hauts fonctionnaires disparaissent après avoir servi. Au contraire, l’ancien chef de la division des maladies transmissibles de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) est devenu un consultant extrêmement sollicité. Mais ses revenus ne semblent pas proportionnels à sa notoriété.

Daniel Koch est peut-être le deuxième Suisse le plus connu dans le pays, après Roger Federer, avec qui il partage deux points communs. Lui aussi est champion dans une discipline sportive (le canicross) et ses revenus semblent fasciner une partie de l’opinion publique. Fasciner et irriter, plus précisément, car le médecin biennois est régulièrement accusé de monnayer sa notoriété, après avoir incarné la lutte contre le Covid-19. Nous l’avons justement rencontré lors d’une conférence rémunérée, ce samedi à Crans-Montana. Le plus célèbre médecin chauve de Suisse est-il vraiment avide de lumière et d’argent?

Pas devenu businessman

Il continue à s’exprimer publiquement, détaille-t-il quelques instants avant de monter sur scène, car «le problème – la pandémie – existe toujours, et aussi longtemps que je peux apporter mes connaissances pour résoudre le problème, je le ferai». Le médecin spécialisé en santé publique poursuit, presque gêné, en disant avoir eu une crainte lors de son départ. «Puisque j’étais apparemment le visage du problème, il fallait éviter que les gens pensent que comme je me retirais, le problème avait également disparu.»

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Le coronavirus ne s’est pas évaporé et les sollicitations non plus, qui «étaient déjà très nombreuses avant mon départ de l’OFSP, de la part des médias et pour des conférences». C’est pour cette raison qu’il a créé Daniel Koch Consulting, le 18 juin: «Avant ma retraite, il était très clair que j’allais continuer à être sollicité et je ne voulais pas commencer quelque chose sans être sûr d’être parfaitement dans la légalité. Mais il y a eu un malentendu dans la presse alémanique: le but n’est pas d’en faire un business; simplement, en Suisse, vous avez besoin d’une structure pour facturer des honoraires, payer l’AVS, etc.» Sa petite entreprise n’est pas une Sàrl ou une SA, qui auraient nécessité d’apporter un capital de 20 000 ou 50 000 francs, mais une entreprise individuelle.

Activité «dans le rouge»

Et quel genre de revenus dégage cette activité? On lui soumet les chiffres dont on entend parler à son propos, de 5000 à 10 000 francs par engagement. La tête d’affiche de la conférence de Crans-Montana, qui a attiré 180 personnes ce samedi, ne dira pas combien il a été payé, si ce n’est que le montant est bien inférieur à cette fourchette. «Il y a des choses pour lesquelles je me fais correctement payer, mais ce n’est pas une entreprise; je suis très demandé et je fais ce qui me fait plaisir», glisse le diplômé de l’Université Johns-Hopkins à Baltimore, aux Etats-Unis. On tente du côté des organisateurs, l’association des propriétaires d’appartements dans la station valaisanne. Son président Cédric Berger ne donne pas de chiffre précis, mais estime le cachet «raisonnable» et «bien inférieur aux sommes mentionnées».

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Jusqu’à maintenant, cette activité «est plutôt dans le rouge, reprend Daniel Koch, car je paie une personne indépendante pour gérer mes e-mails, les invitations; je n’arriverais pas à le faire seul et je ne veux pas le faire». Une autre raison provient du nombre important de sollicitations que l’ex-Monsieur Covid refuse: «J’ai par exemple reçu plusieurs demandes pour prononcer des discours du 1er Août, je n’ai pas donné suite, car je ne suis pas un politicien.»

Payé 700 francs par le CP Berne

Pas politicien mais lié au CP Berne, le plus grand club de hockey du pays, par un mandat supposé juteux. «Je ne suis ni lié avec le club de Berne ni son employé, je le conseille de manière un peu plus détaillée que ce que je fais avec la presse. Jusqu’à maintenant, j’ai fait deux séances, qui m’ont rapporté 700 francs», conclut l’ancien médecin au CICR, qui publiera mi-septembre un livre relatant ses expériences professionnelles dans des situations de crise. «J’ai raconté ces épisodes à mon coauteur, un médecin à la retraite, et j’ai personnellement rédigé deux chapitres, dont celui consacré au Covid. J’espère que ça plaira au public, c’est pour ça que je le fais.»

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